Systèmes experts
Il n’existe pas de raccourci pour l’intelligence, pas d'équations de Maxwell de la pensée à découvrir, ni de formalisme puissant qui nous dispensent de la nécessité d’accumuler beaucoup de connaissances. Douglas Lenat (1990)
Injecter de la connaissance
L’âge d’or s'était trop concentré sur des approches générales, comme la recherche et la résolution de problèmes. Un ingrédient clé manquait, un élément crucial : la connaissance.
Les années 1980 voient l’émergence des systèmes experts. Ces programmes répondent à des questions précises et résolvent donc des problèmes spécifiques. L’objectif n’est plus de créer une intelligence générale, mais de se spécialiser sur des domaines particuliers, dits étroits. Les connaissances humaines nécessaires sont assemblées dans des bases de données, dont l'exploitation est articulée par des règles logiques. La conception de ces systèmes est réalisée avec la participation d'experts humains. À la différence des programmes généraux de l'âge d'or, les systèmes experts ont des applications commerciales directes.
Des systèmes experts efficaces
Nous pourrions citer aussi
Ces succès ont attiré l'intérêt des investisseurs, ce qui a créé un boom économique. Et c’est reparti pour un printemps, le second, entre 1980 et 1987 (environ).
Cyc, le monstre
Les règles logiques simples permettent de construire les schémas de représentation des connaissances utilisés dans les systèmes experts. Les chercheurs ont travaillé sur ces sujets, afin de continuer à construire des systèmes qui s’appuient sur une logique transparente, proche du raisonnement humain. La connaissance est toutefois difficile à représenter et à modéliser, surtout dans des environnements complexes. Représenter le sens commun est un défi majeur.
La plupart des choses que nous devons savoir pour nous débrouiller dans le monde réel sont trop évidentes pour être dans des livres. Douglas Lenat (1990)
On ne vit qu’une fois, rien ne peut être à deux endroits à la fois, les animaux n'aiment pas la douleur … Peut-être que la vérité la plus difficile à affronter, une vérité que le domaine essaie d'esquiver depuis 34 ans, c'est qu'il n'existe probablement pas de moyen élégant et facile d'obtenir cette immense base de connaissances. L'essentiel de l'effort doit plutôt consister, du moins au début, en une saisie manuelle de faits.
L'approche proposée par son fondateur, le chercheur
Douglas Lenat a consacré sa vie à résoudre les mystères du sens commun. Il estime que le problème est que les chercheurs en intelligence artificielle ont rechigné à affronter le véritable problème. Ce qu'il faut, dit-il, c'est rien de moins qu'un projet Manhattan de l'IA, une attaque frontale complète contre le bon sens. Le défi est de créer une Encyclopédie du Sens Commun, c'est-à-dire un ensemble presque complet de règles du sens commun. En d'autres termes, au lieu d'analyser des morceaux isolés de logique, il préconise une approche totalement brutale. Michio Kaku (1999)
Le domaine pourrait tirer profit d'une description et d'une évaluation systématiques de CYC.
Si CYC a fait des avancées conséquentes sur ce type de raisonnement frappé par le bon sens, il est essentiel de le savoir, pour s'en servir comme outil et comme point de départ pour des recherches ultérieures.
Si CYC a rencontré des difficultés, il serait utile de le savoir pour ne pas reproduire les erreurs.
Si CYC est totalement inutile, les chercheurs peuvent arrêter de se préoccuper de ce sujet et ne pas réinventer la roue. Ernest Davis & Gary Marcus (2015)
Un second hiver
La connaissance est difficile à représenter, à modéliser et à injecter dans les programmes, mais ce n'est pas impossible. D'évidence, les systèmes experts sont encore utilisés aujourd’hui, l'ensemble des programmes conçus et développés lors de la bulle deep sont des systèmes experts !
Les systèmes experts sont utiles ; mais ils ne sont pas parfaits. Ils sont coûteux à concevoir et maintenir, difficiles à mettre à jour voire, dans certains cas, figés. Ils sont surtout fragiles. Un système expert peut tout à fait faire des erreurs, voire raconter n’importe quoi, lorsqu'on lui donne des données inhabituelles, pathologiques ou en dehors de son champ d’expertise. Vers la fin des années 1980, l’intérêt du public pour les systèmes experts cesse, sans qu’ils aient forcément beaucoup déçu.